« J’étais là tout le mois d’août. A part un monsieur de 63 ans, personne n’est mort. Je l’aurais su, on est un petit village. » Au téléphone, le secrétaire de la mairie de Néfiach est formel : dans cette commune de 1 292 âmes près de Perpignan (Pyrénées-Orientales), aucune Evelyne Bailly n’est morte récemment, contrairement à ce que rapporte une rumeur partagée sur les réseaux sociaux. « Evelyne Bailly, une mère de famille de 31 ans, 3 enfants de 2 à 10 ans, a reçu le vaccin Pfizer le 3 août, peut-on y lire. Violents maux de tête immédiats. AVC au travail. Elle décède 3 heures après l’injection. La cérémonie religieuse à l’église le 10.08.21. » Suivent trois émoticones de mains qui prient et quatre hashtags comme #BlanquerMent ou #Manif14août.

  • « C’est bidon » : des morts inventées

A Néfiach, l’église est à quinze mètres de la mairie : un enterrement, ça se serait su. La responsable du lieu sacré n’apprécie guère. « J’ai 80 ans. Les rumeurs, j’en ai ma claque », tranche-t-elle avant d’écourter la conversation. Renseignement pris auprès des élus locaux et de la police municipale, la mairie de Néfiach est formelle : « Il n’y a rien eu, c’est bidon. »

Cette fausse annonce de mort, ou du moins fort imprécise, n’est pas une première. Dès décembre 2020, les antivax américains ont fait courir le bruit que Tiffany Dover, une véritable infirmière américaine a eu un malaise après sa première dose ,était morte, malgré ses démentis et ceux de ses proches.

Depuis le début de la campagne de vaccination contre le Covid-19, les militants qui y sont hostiles redoublent d’efforts pour discréditer les vaccins, en amplifiant et manipulant les informations sur les effets secondaires. Les publications sur les réseaux ou les éléments de discours varient, mais font souvent appel aux mêmes biais.

Les drames partagés par les antivax ne sont pas tous fictifs. Mais ils sont instrumentalisés. Ainsi, une pancarte brandie lors d’une manifestation contre le passe sanitaire le 31 juillet interpelle : « Anthony Rio, 24 ans, mort du vaccin le 18 mars 2021. Ne l’oublions pas ! Et combien d’autres ? » Une référence au Décès d’un étudiant en médecine âge de 24 ans ,mort d’une thrombose peu après sa première injection, au printemps. La pancarte suggère qu’il y a de nombreuses autres victimes. On retrouve dans la presse les cas de Joël Crochet, 63 ans, en Haute-Savoie, ou encore Marie-France, une femme de 70 ans, dans l’Ariège, morts peu après avoir reçu une première injection. S’il est toujours difficile de prouver un lien certain de cause à effet, dans ces cas, le lien médicamenteux fait l’objet d’une forte suspicion