Le président de la République a décidé, mercredi dernier en Conseil des ministres, de restaurer le poste de Premier ministre (PM) au bout de deux ans, six mois et 20 jours de suppression. La nouvelle a fini de dérouter les Sénégalais qui s’interrogent sur le bien-fondé de cette décision post-électorale. Pour le président du groupe parlementaire de la majorité, Aymerou Gningue, tout ceci répond à un schéma cohérent et bien pensé. Rien n’a été le fruit d’un tâtonnement.

Invité de l’émission «Objection» de ce dimanche sur Sud Fm, il déclare : «Il faut se rendre à l’évidence. Dans le système qui est mis en place, c’est le président qui est élu au suffrage universel. C’est lui qui prend un engagement devant le peuple qui lui donne mandat de définir la politique nationale. Il dispose d’instruments pour organiser sa forme de gouvernance, avec ou sans Premier ministre, parce que la Constitution le lui permet, pour atteindre les objectifs qu’il s’est assignés sur la base du programme qu’il a décliné.» 
Les vraies raisons des crises au sommet
Si certains analystes pointent les crises au sommet de l’Etat pour expliquer l’instabilité du poste de Premier ministre, le député estime que le couple peut bien vivre en parfaite harmonie, si celui qui est nommé, c’est-à-dire le Premier ministre, fait preuve de loyauté. 
«Le Premier ministre est nommé par le président et il a une triple responsabilité : politique, comptable et pénale. C’est vrai que dans certains cas, il peut arriver qu’il y ait crise. Quand il y a crise, celui qui perd, c’est celui qui a été nommé. Parce que je ne peux pas vous nommer à un poste pour que vous mettiez en musique la politique que j’ai définie et que je constate que véritablement, vous n’êtes pas à votre place ou vous êtes en train de mener votre propre calendrier», indique-t-il. 
Mais il existe aussi des cas qui prouvent que c’est bien possible d’avoir une stabilité au sommet. «On a vu des Premiers ministres rester pendant longtemps en poste. C’est le cas de Macky Sall et Mohamed Boun Abdallah Dionne qui sont restés plus de quatre ans», confie Aymerou Gningue. Ce qui justifie le retour du poste de PM
S’agissant du bien-fondé de la décision du président de restaurer le poste de PM, le président du groupe parlementaire Benno Bokk Yaakaar pointe deux «impératifs». «Le premier impératif, c’est que nos Etats, dans la forme de gouvernance qu’ils sont en train d’appliquer qui est une gouvernance qui prend en compte la gestion axée sur le développement et la nécessité de rendre compte, parce qu’ils sont contrôlés à priori et à posteriori dans l’évaluation des politiques publiques, ont besoin d’avoir une autre forme de gouvernance», souligne-t-il. 
Le deuxième impératif, selon Gningue, «c’est qu’au sortir des élections de 2019, le président a gagné avec 58 % des voix. Le premier acte qu’il a posé, c’était de dire : je fais un appel pour un dialogue politique». 
Poursuivant son argumentaire, il ajoute : «Le président a voulu avoir un contact direct avec ce peuple-là. Avec la Covid-19, que se passerait-il, si le président (sans Premier ministre) n’était pas en premier ligne dans la riposte ? Est-ce que le Sénégal ne serait pas dans une société beaucoup plus difficile ? Mais passons. En ayant ce contact avec les populations, vous arrivez à reprofiler les objectifs. Si le président n’était pas en première ligne, certainement le Pap2A n’aurait pas été fait.» 
Maintenant, poursuit-t-il, «une fois que vous avez défini les axes stratégiques, vous avez besoin de mettre en musique. Il faut quelqu’un pour coordonner ces actions». 
Autre argument qui justifie la nécessité de restaurer le poste de Premier ministre, selon Aymerou Gningue, c’est que «nous sommes dans une phase où on dirige le pays avec un budget programme où la culture du résultat prime sur la culture des moyens. D’où la nécessité de donner au Parlement la possibilité de procéder aux évaluations des politiques publiques. Quand vous faites ça, vous avez besoin maintenant d’un Premier ministre qui coordonne l’activité du gouvernement en engageant sa responsabilité politique et comptable».