Des soldats érythréens ont tué « des centaines de civils » en novembre 2020 au Tigré, région du nord de l’Ethiopie en proie aux combats, lors d’un massacre qui pourrait constituer un crime contre l’humanité, accuse Amnesty International, vendredi 26 février, dans un rapport. L’ONG fonde ses affirmations sur des témoignages de survivants – réfugiés au Soudan voisin ou joints par téléphone – et sur des images satellite de la ville d’Aksoum, une ville antique et sainte du nord du Tigré.
« Les preuves sont accablantes et mènent à une conclusion effrayante. Les troupes éthiopiennes et érythréennes ont commis de multiples crimes de guerre dans leur offensive pour prendre le contrôle d’Aksoum », affirme Deprose Muchena, directeur régional de l’ONG pour l’est et le sud de l’Afrique. « Plus encore, les troupes érythréennes se sont déchaînées et ont méthodiquement tué des centaines de civils de sang-froid, ce qui semble constituer des crimes contre l’humanité. Cette atrocité compte parmi les pires documentées à ce jour dans ce conflit », estime-t-il.
Le Tigré est en proie aux combats depuis le lancement, le 4 novembre, par le gouvernement éthiopien d’une opération militaire contre les forces du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), parti qui gouvernait la région et qu’Addis-Abeba a accusé d’avoir attaqué des bases de l’armée fédérale. Le premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, a proclamé la victoire le 28 novembre après la reprise de la capitale régionale, Mekele, bien que le TPLF ait juré de continuer à se battre. Des combats persistent.
Les troupes érythréennes, allié non officiel
Depuis le début du conflit, il y a près de quatre mois, le Tigré n’a plus accès à Internet et les déplacements y sont toujours restreints, ce qui rend difficile la vérification des informations sur le terrain. La présence de troupes venues d’Erythrée, pays frontalier du Tigré, pour épauler les forces éthiopiennes a été rapportée par des habitants, des travailleurs humanitaires et des responsables locaux, mais a toujours été démentie par Asmara et Addis-Abeba. Les deux pays se sont affrontés dans un sanglant conflit entre 1998 et 2000, alors que le TPLF était au pouvoir en Ethiopie, avant de se rapprocher à l’initiative d’Abiy Ahmed, récompensé du prix Nobel de la paix en 2019. La haine reste tenace entre les autorités érythréennes et le TPLF.